Au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), le groupe parlementaire Défi a tablé une proposition de décret concernant l’instauration d’examens d’entrée à l’enseignement supérieur, ainsi qu’à l’instauration de cours de renforcement obligatoires pour ceux qui devraient rater à ces évaluations.
Nous, Etudiant Socialistes, nous opposons fermement à l’instauration de tout examen d’entrée à l’enseignement supérieur. Si l’objectif affiché de cette proposition est de réduire le taux d’échec des établissements wallons et bruxellois, celle-ci aura pour effet collatéral de renforcer la difficulté d’accès à l’enseignement supérieur, et ce disproportionnément pour les étudiants issus de milieux sociaux défavorisés, notamment à travers une série de biais psychologiques qu’elle contribuerait à institutionnaliser. De nombreuses études démontrent que les tests à l’entrée ne sont pas de bons indicateurs prédictifs de la réussite ; il s’agit plutôt de faire croire à des étudiants qui ont le potentiel d’être brillants qu’ils « ne sont pas faits pour les études ». Additionnellement, nous craignons que cette proposition s’inscrive dans une dynamique politique de long-terme visant à restreindre plus fermement l’accès à l’enseignement supérieur : l’instauration d’examens non-contraignants facilitant l’instauration, plus tardive, d’examens d’entrée contraignants.
Dès lors, ces examens réduiraient peut-être le taux d’échec des établissements de FWB, mais ces taux d’échecs réduits ne constitueraient que des artifices statistiques, de beaux nombres masquant l’inégalité structurelle sur laquelle repose notre société.
Nous, Etudiants Socialiste, nous opposons également à l’instauration de cours de renforcement obligatoires. Au-delà de l’aspect infantilisant, cette proposition ne prend pas en compte les difficultés sociales que peuvent rencontrer les populations étudiantes, et ne questionne pas les formes culturelles de domination qui existent au sein de l’enseignement supérieur. En effet, les jeunes qui devront suivre des cours de rattrapages sont soit des jeunes qui sortent d’écoles moins « prestigieuses », soit des jeunes qui n’ont pas une situation financière stable et du soutien académique auprès de leur famille (pas de parents diplômés par exemple), ou encore des jeunes qui ont besoin de cumuler études et travail pour subvenir à leurs besoins. Ajouter des cours de renforcement obligatoires complexifiera le parcours de jeunes défavorisés qui ne peuvent se permettre de rajouter des cours obligatoires à leur cursus ; ils constituent donc un nouveau rempart à l’accès aux études supérieures de jeunes défavorisés.
Afin de favoriser l’égalité des chances, nous soutenons l’instauration de cours de renforcement non-obligatoires dans tous les établissements de l’enseignement supérieur. Notre système d’enseignement doit permettre à tous les étudiants d’entamer leurs études supérieures avec les mêmes outils d’apprentissage. Dans ce but, il est urgent que les établissements d’enseignement supérieur proposent des cours de renforcement gratuits dans les matières-clés de chaque cursus. Ces cours pourraient être dispensés durant les deux premières semaines de l’année académique, et se feraient sur base entièrement volontaire. L’instauration éventuelle d’un test facultatif ne pourrait avoir qu’un caractère indicatif, visant uniquement à permettant aux étudiants qui le souhaitent d’identifier les lacunes à combler.
Nous déplorons que la proposition du groupe Défi élude complètement le nécessaire débat du refinancement de l’enseignement supérieur public en FWB, dont nous sommes certains qu’il contribuerait plus adroitement à la réduction du taux d’échec, sans pour autant également réduire le taux de participation aux études supérieures. Cette proposition élude également la question des inégalités en enseignement secondaire sur le territoire de la fédération, d’où nait une part non-négligeable de ces taux d’échec déplorables.
L’instauration d’examens d’entrée et de cours de renforcement obligatoires est en contradiction évidente avec le rôle primaire que nous attribuons à l’université : celui de former et non d’évaluer.